lundi 17 juin 2013

B) Nécessité et utilité du budget
L'établissement du budget se justifie pour plusieurs motifs:
- C'est essentiellement par le canal du budget que la Chambre des députés contrôle la
politique du Gouvernement. Il n'est en effet guère praticable d'associer le parlement à la
gestion des affaires publiques lors de chaque acte de recette ou de dépense. Par contre,
l'appréciation par la Chambre des députés de la gestion financière du Gouvernement est
facilitée si elle s'exerce sur les conséquences financières, pour une année entière, de la
politique du Gouvernement, qui sont présentées dans un document unique s'exprimant
en chiffres tant du côté des recettes escomptées que du côté des dépenses envisagées.
- Une deuxième justification est d'ordre économique. Il s'agit de l'influence considérable
que les masses budgétaires tant en recettes qu'en dépenses exercent sur l'économie du
pays.
- L'établissement du budget s'impose pour des raisons financières. En périodes normales
les besoins à satisfaire dans un Etat dépassent, parfois sensiblement, les ressources
disponibles. Le budget est l'art du choix. Il y a des dépenses indispensables, des
dépenses nécessaires et des dépenses utiles. Parmi les dépenses, les unes sont
pressantes, d'autres le sont moins, d'autres encore peuvent attendre sans dommages pour
la collectivité. Le budget est l'instrument qui permet d'opérer les choix.
- Enfin, une quatrième justification du budget est de nature comptable. Le budget est le
moyen de contrôler s'il y a balance entre les recettes escomptées et les dépenses
projetées et si, en cas d'excédent des crédits de dépenses, ce déséquilibre comptable ne
met pas en péril l'équilibre économique général du pays.
C) Principales caractéristiques du budget
De la définition du budget découlent un certain nombre de caractéristiques:
1) Le budget est un acte de prévision
Ceci distingue le budget du compte général qui est aussi une loi et comprend des
tableaux similaires à ceux du budget.
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La prévision joue:
pour les recettes: estimation du rendement des impôts notamment.
pour les dépenses: - coût de l'exécution des lois et règlements (dépenses obligatoires,
telles participation de l'Etat au financement de l'assurance-pension, dépenses de
personnel sur place etc.) - estimations des besoins de l'administration en ce qui concerne
les dépenses non obligatoires.
2) Le budget est un acte d'autorisation
L'autorisation concernant les recettes est donnée principalement par les dispositions de
la loi budgétaire (prorogation annuelle des lois fiscales!) L'inscription d'une recette au
budget des recettes ne tient par contre pas lieu d'autorisation, elle ne constitue pas un
plafond pour les recouvrements.
Pour les dépenses au contraire, l'autorisation résulte des crédits inscrits aux tableaux des
dépenses et n'est valable que jusqu'à concurrence du montant inscrit. Même si une autre
loi rendait une dépense obligatoire, le crédit ne peut être dépassé qu'après modification
du budget.
Malgré le caractère de loi du budget, l'inscription d'un crédit budgétaire ne crée pas
l'obligation ni de recouvrer des recettes ni d'effectuer des dépenses jusqu'à concurrence
du montant inscrit. En particulier, la seule inscription d'un crédit budgétaire ne saurait
créer un droit direct en faveur d'un tiers, même nommément désigné dans l'article
budgétaire.
En matière de recettes, si le budget dans sa partie "Loi budgétaire" oblige
l'administration de recouvrer les impôts, il n'y a aucune obligation d'atteindre le montant
inscrit.
Conclusion:
Pour ce qui est des crédits inscrits aux tableaux, la situation des recettes et des dépenses
n'est pas symétrique:
- pour les recettes, le chiffre est une simple prévision, mais en constitue ni un plafond à
ne pas dépasser, ni un minimum à recouvrer.
- pour les dépenses, le montant constitue un plafond de dépenses autorisé, mais sans
obligation de dépenser.
D) Distinction du compte général de l'Etat
1) La notion du compte général de l’Etat
Définition: Le compte général de l’Etat est un tableau établi chaque année par le
Ministre du Budget sous forme de projet de loi qui contient la récapitulation des recettes
et des dépenses budgétaires effectivement réalisées au cours d’un exercice donné et qui
est soumis, ensemble avec les observations de la Cour des comptes, au vote de la
Chambre des députés.
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Base légale: C-104: “ Chaque année la Chambre [des députés] arrête la loi des
comptes... ” Toutes les recettes et dépenses de l’Etat doivent être portées ... dans les
comptes ”
C-105 al.4: “ Le compte général de l’Etat est soumis à la Chambre des députés avec les
observations de la Cour des comptes. ”
2) Les délais pour l'établissement du compte général
LC - art. 11. « Pour le 31 mai au plus tard le projet de loi portant règlement du
compte général de l'exercice précédent est déposé à la Chambre des députés et
transmis à la Cour des comptes ».
LC Art. 12. « Pour le 30 septembre au plus tard, la Cour des comptes
communique ses observations relatives au compte général de l'exercice précédent
à la Chambre des députés ».
3) Intérêt et fonction du compte général
- Le budget est le cadre financier à l’intérieur duquel le gouvernement entend mettre à
exécution son programme gouvernemental pendant une année. Cette exécution dépend
essentiellement de la rentrée dans les caisses de l’Etat, en cours d’année budgétaire, des
recettes inscrites au budget et de la possibilité d’exécuter le programme dans le respect
du carcan que constituent pour lui les crédits votés.
- Par le biais de l’examen du projet de loi des comptes, la Chambre des députés contrôle
a posteriori que l’exécution administrative et comptable du budget a eu lieu dans le
cadre des dispositions constitutionnelles, légales et réglementaires, notamment en ce qui
concerne les règles de la comptabilité de l’Etat. Ce contrôle lui est facilité par les
observations obligatoires de la Cour des comptes jointes au projet de loi des comptes.
- Les comptes généraux fournissent à la Chambre l’occasion d’apprécier la qualité et la
sincérité des prévisions budgétaires. Est-ce que les estimations des recettes ainsi que des
dépenses, notamment des dépenses obligatoires, ont elles été réalistes?
- L’analyse des comptes généraux constitue un outil important pour apprécier la qualité
des prévisions pour les budgets futurs. C’est pourquoi, avant de procéder au vote du
budget d’un exercice déterminé, la Chambre des députés doit disposer, suivant la loi sur
la comptabilité de l’Etat, du compte général relatif au dernier exercice clos.
Remarque: Nonobstant l’importance certaine des comptes généraux, force est de
constater que ni les députés, ni les média n’en semblent être totalement conscients.
Cette opinion se reflète parfaitement dans la comparaison que l’on peut faire entre le
volume des débats parlementaires et des relations dans la presse, consacré au projet de
budget, d’une part, et au projet de loi des comptes, d’autre part.
La comparaison entre le budget et les comptes généraux risquerait d’être stérile si elle
ne permettait plusieurs constatations:
D’abord, le budget est pour ainsi dire la pièce d’apparat de tout gouvernement et
l’occasion pour l’opposition de faire valoir le manque d’imagination et de créativité du
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gouvernement en place. Rien de tel ne se rencontre à l’occasion de l’établissement des
comptes généraux.
D’autre part, et surtout, le sort différent fait au budget et aux comptes s’explique
aisément du point de vue psychologique: le budget c’est l’avenir qu’il s’agit de
façonner; les comptes généraux, c’est le passé figé et immuable dont les actions et
décisions ne sont en principe pas susceptibles d’être rapportées.
E) Les principes budgétaires traditionnels
Les principes budgétaires classiques, dégagés au 19ème siècle, sont au nombre de 5:
l'unité, l'universalité, l'annualité, la spécialité ainsi que la publicité budgétaire.
1) Le principe de l'unité budgétaire
Base légale:
C-104 « Toutes les recettes et toutes les dépenses de l'Etat doivent être portées au
budget »
LC-2 « Le budget de l'Etat est la loi annuelle qui prévoit et autorise toutes les
recettes et toutes les dépenses à effectuer par l'Etat pendant l'exercice pour lequel
il est voté "
Signification: Le principe de l'unité exige que l'ensemble des dépenses et des recettes de
l'Etat doit être présenté dans un seul document pour l'année entière.
La règle poursuit un but politique et un but technique:
- elle tend à offrir à la Chambre des députés, lors du vote du budget, une vision globale
et complète des prévisions de dépenses et de recettes de manière à lui permettre un
contrôle efficace sur l'Exécutif.
- d’un point de vue technique la règle de l'unité sert à assurer une présentation claire du
budget.
Le principe de l'unité du budget est donc tant une règle de forme et de présentation
qu'un impératif politique et technique.
D'après les financiers classiques la présentation doit être telle qu'il suffit de faire deux
additions, l'une des recettes escomptées et l'autre des crédits émargés, pour savoir par
comparaison du total des dépenses et du total des recettes si les finances publiques sont
en équilibre, en excédent ou en déficit.
a) Aménagements de la règle de l'unité:
- La débudgétisation:
Sans qu'il n'existe de définition stricte de la « débudgétisation », elle évoque
généralement un procédé qui consiste pour un pouvoir public et notamment pour l'Etat à
faire exécuter des tâches et/ou financer des dépenses par des organismes tiers plus ou
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moins autonomes et à personnalité juridique distincte. Ce faisant, ces dépenses
n’apparaissent plus clairement dans le budget de ce pouvoir public.
La débudgétisation se fait essentiellement à travers la création d’établissements publics
(c.-à-d. des structures de droit public, à personnalité juridique propre, créées par une loi
particulière qui fixe les règles de leur fonctionnement) ou d’associations sans but
lucratif (asbl, structure de droit privée)
Exemples de débudgétisation:
- Entreprise des postes et télécommunications (loi août 1992)
- Banque et Caisse d'Epargne de l'Etat
- Domaine de la Sécurité Sociale (notamment Caisses de Maladie)
- Secteur conventionné (= associations sans but lucratif liées à l'Etat par des
conventions en vertu desquelles elles sont chargées de missions précises,
notamment dans le domaine social (crèches, foyers pour handicapés, maison
de jeunes etc.). En contrepartie, les a.s.b.l. bénéficient d'une participation de
l'Etat à leur frais de fonctionnement, généralement sous forme de prise en
charge par l'Etat de leur déficit d'exploitation).
- etc.
- Les budgets rectifiés et les crédits spéciaux: cf infra : Modifications
législatives du budget
b) Corollaire de la règle de l'unité budgétaire:
Le principe de l'unité budgétaire comporte comme corollaire le principe de la nonaffectation
des recettes (appelé encore « unicité de la caisse de l’Etat »):
LC- art 4: "L'ensemble des recettes s'applique à l'ensemble des dépenses"
Les recettes ne peuvent être affectées à des dépenses déterminées. L'ensemble des
recettes doit servir à payer l'ensemble des dépenses inscrites au budget. C'est une
conséquence de la règle de l'unicité de caisse de l'Etat, qui doit recevoir toutes les
recettes qu'elle qu'en soit l'origine.
Le principe de non affectation n'interdit pas d'instituer une nouvelle taxe en vue de
financer une dépense précise, seulement la recette prévue ainsi que le montant de la
dépense doivent être inscrits au budget général et lors de l'exécution de celui-ci la
dépense pourra être effectuée comme prévu alors même que la taxe n'aurait pas le
rendement escompté; inversement la dépense devra être limitée au crédit initialement
prévu nonobstant le fait que la recette peut s'avérer supérieur aux prévisions. (p.ex.
impôt de solidarité alimentant le Fonds pour l'emploi)
Le principe de la non-affectation des recettes connaît une série de dérogations:
- les recettes d'emprunt
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LC-5: "Les recettes provenant de l'émission d'emprunts ne peuvent servir qu'au
financement de projets d'investissements de l'Etat"
En vertu de ce texte il est interdit de recourir à l'emprunt pour financer les dépenses de
fonctionnement courantes ce qui implique que le budget des recettes et des dépenses
courantes doit être en équilibre, sinon excédentaire.
- Les emprunts contractés par l'Etat au profit du Fonds des routes ou du Fonds du Rail
alimentent ces fonds sans transiter par le budget.
2) Le principe de l'universalité budgétaire
Base légale:
C-104 "Toutes les recettes et toutes les dépenses de l'Etat doivent être portées au
budget [...]"
Signification: Les recettes et les dépenses de l'Etat doivent être portées au budget pour
leur montant brut.
Justification: toutes les recettes et dépenses devant être autorisées par le législateur, le
principe de l'universalité a pour objet d'éviter que le gouvernement puisse engager des
dépenses supplémentaires en les compensant par des recettes s'y rapportant.
a) Inconvénients de la règle de l'universalité:
- La règle du produit brut entraîne un gonflement des postes du budget et du montant
global du budget.
- La stricte observation de la règle peut enlever un certain attrait aux initiatives
méritoires des services, puisqu'ils savent d'avance que les opérations pécuniaires bien
réussies ne profiteront pas aux services qui les ont réalisées, mais que les sommes
retirées de ces opérations seront inscrites tout simplement dans le budget des recettes de
l'Etat.
- La règle ne permet pas d'entrevoir le coût net des services, puisque les dépenses
entraînées par un service ne sont pas compensées par les recettes qu'il procure.
b) Dérogations à la règle de l'universalité :
- Les restitutions d'impôts ne sont pas comptabilisées comme dépenses, mais viennent
en diminution des recettes de même nature, de sorte que les recettes renseignées au
compte général sont des recettes nettes.
- Cas de débudgétisation (cf. supra: unité budgétaire) :
- p.ex. figure seul au budget de l'Etat en ce qui concerne l'entreprise des P. et T. le
bénéfice net distribué et revenant à l'Etat (cf. Budget 2008 art.65.2.28.015 : Part de
l'Etat dans le bénéfice de l'entreprise des postes et télécommunications: 30 mio €)
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- p.ex. figure au budget du Ministère de la Famille la seule participation de l'Etat au
financement des crèches conventionnées, participation correspondant en principe au
déficit d'exploitation (dépenses de fonctionnement - participation des parents)
3) Le principe de l'annualité budgétaire
Base légale:
C-104 « Chaque année la Chambre vote le budget»
C-100 « Les impôts au profit de l'Etat sont votés annuellement »
C-99 « Aucune charge grevant le budget de l'Etat pour plus d'un exercice ne peut
être établie que par une loi spéciale »
LC-2: « Le budget est la loi annuelle ... »
Il résulte du principe que les autorisations conférées par le budget - pour les dépenses -
et la loi budgétaire - pour ce qui est des recettes - deviennent caduques à l'expiration de
l'exercice budgétaire. (pour la notion et la durée de l'exercice budgétaire: cf infra).
Assouplissements de la règle de l'annualité:
- le recours à la technique des douzièmes provisoires: l'autorisation est conférée pour
une durée inférieure à l'année (cf. infra);
- le recours à des fonds spéciaux et la débudgétisation qui conduisent à des autorisations
de dépenses dépassant le cadre de l'exercice budgétaire.
4) Le principe de la spécialité budgétaire
Ce principe commande la subdivision du budget en crédits destinés à des fins
particulières précises et interdit l'utilisation des crédits votés à d'autres fins que celles
pour lesquelles ils ont été accordés.
Le principe résulte clairement de la loi sur la comptabilité de l’Etat :
LC-3 « Le budget est subdivisé en titres, chapitres, sections et articles »
Applications pratiques:
- Division du budget en budget des dépenses, budget des recettes et budget pour ordre;
puis en titres, chapitres, sections et articles
- Interdiction de créer des articles "fourre-tout"
- Interdiction de transférer des crédits entre articles sauf à l'intérieur d'une même section
(C - 105). (Limites et procédure de transferts: cf. infra : Modifications exécutives au
budget)
5) La publicité budgétaire
Base légale: résulte du fait que le budget est une loi et est soumis aux formalités de
publicité de ces dernières.
Remarque: alors que les lois entrent en vigueur dans les trois jours francs de leur
publication au Mémorial sauf si elles disposent autrement, la loi budgétaire stipule
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traditionnellement qu'elle entrera en vigueur le 1er janvier de l'année auquel elle
s'applique. Cette disposition s'avère nécessaire pour le cas où, à la suite de difficultés
techniques inhérentes à la procédure législative, le budget ne pourrait pas être publié
dans le délai de trois jours francs précédant le 1er janvier.
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CHAPITRE 2 - STRUCTURE DU BUDGET ET CLASSIFICATIONS
A) Structure légale des tableaux de recettes de dépenses du budget
Schéma général:
1) Les différents budgets
LC-3 : « Le budget de l'Etat se compose d'un budget des recettes et d'un budget
des dépenses, ainsi que d'un budget des recettes et des dépenses pour ordre »
Il en résulte une première subdivision du budget en :
Budget des recettes;
Budget des dépenses;
Budget des recettes et dépenses pour ordre
Remarque : Notion du budget des recettes et des dépenses pour ordre :
LC-78: " (1) Les recettes encaissées par l'Etat pour compte de tiers sont portées
au budget des recettes et des dépenses pour ordre.
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(2) Si, à la clôture définitive de l'exercice, les recettes excèdent les dépenses, le
surplus peut être reporté à l'exercice suivant.
(3) Les dépenses pour ordre ne peuvent pas dépasser le montant des recettes
correspondantes."
Le budget pour ordre regroupe ainsi les recettes effectuées par l'Etat pour le compte de
tiers ainsi que, au niveau des dépenses, les montants correspondants revenant aux tiers
bénéficiaires. Le budget pour ordre correspond dès lors aux opérations qui sont
financièrement neutres pour l'Etat.
D’un point de vue gestion budgétaire le budget pour ordre est soumis aux mêmes règles
que la budget des recettes et le budget des dépenses proprement dits.
Des précisions ainsi que des dérogations aux principes de LC-78 sont prévues
annuellement dans la loi budgétaire qui indique également les opérations précises à
imputer au budget pour ordre
Exemples d'opérations imputées au budget pour ordre: - Extrait LB-2008 :
- Projets européens
« Art. 21. - Recettes et dépenses pour ordre: Fonds structurels communautaires, projets ou
programmes de l’Union européenne
Les recettes et les dépenses effectuées par l’Etat pour le compte de l’Union européenne sont
imputées aux articles afférents du budget pour ordre, correspondant chacun à un fonds, projet ou
programme de l’Union européenne. Au cours de l’exercice, les dépenses d’un tel article du budget
pour ordre peuvent dépasser le montant des recettes correspondantes »
- contribution changement climatique
« Art. 23. - Recettes et dépenses pour ordre : produit de la contribution changement
climatique
Le produit de la contribution changement climatique prélevée sur les carburants ainsi que son
affectation au fonds de financement des mécanismes de Kyoto peuvent être imputés sur le budget
des recettes et des dépenses pour ordre. »
- TVA
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2) Les titres budgétaires
Base légale: LC-3 (2) « Les dépenses courantes et les dépenses en capital ainsi
que les recettes courantes et les recettes en capital sont regroupés sous des titres
distincts. »
Cette disposition signifie que le budget des recettes et le budget des dépenses sont
subdivisés chacun en deux titres:
Budget des recettes: Titre Ier "Recettes courantes"
Titre II "Recettes en capital"
Budget des dépenses: Titre Ier "Dépenses courantes"
Titre II "Dépenses en capital"
La répartition des recettes et des dépenses entre les différents titres se fait suivant leur
nature économique.
- Les recettes courantes se composent des recettes d'imposition (impôts directs et
indirects) et des recettes en contrepartie de biens livrés ou de services prestés, ainsi que
des placements à court, moyen et long terme des avoirs de l'Etat.
- Les recettes en capital comprennent notamment les revenus provenant des
participations financières de l'Etat au capital d'entreprises commerciales de droit privé et
public, ainsi que les produits des emprunts.
- Les dépenses courantes comprennent les dépenses de fonctionnement ainsi que les
transferts de revenus, tant à l'intérieur du secteur public, qu'à destination du secteur
privé.
- Les dépenses en capital regroupent les dépenses d'investissement directs, les transferts
en capital tant à l'intérieur du secteur public qu'à destination du secteur privé, le
remboursement du principal de la dette publique ainsi que l'octroi de crédits et la prise
de participation dans les entreprises et institutions financières.
3) Les chapitres budgétaires
LC (3) « Le budget est subdivisé en titres, chapitres, sections et articles. »
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Les différents titres budgétaires sont à leur tour subdivisés en chapitres qui
correspondent aux départements ministériels et les chapitres en sections et sous-sections
(= illustration du principe de la spécialité budgétaire qui commande la subdivision du
budget en crédits destinés à des fins particulières précises et qui interdit l'utilisation des
crédits votés à d'autres fins que celles pour lesquelles ils ont été accordés).
La subdivision du budget en chapitres équivalent à des départements ministériels revête
une importance particulière alors qu'elle fixe la compétence respective des différents
ministres. En effet, l'article LC-22(2) dispose que « L'ordonnateur engage, liquide et
ordonnance sous sa responsabilité les dépenses à charge des crédits budgétaires mis à
sa disposition. »
La compétence des différents ministres se trouve fixée à l'arrêté grand-ducal portant
constitution des départements ministériels.
Remarques
- Cette subdivision n'est pas applicable au budget des recettes dont l'exécution est de la
seule compétence du Ministre des Finances. Ce budget est cependant subdivisé par
administrations chargées de recouvrer les recettes (Administration des contributions
directes, Administration de l’enregistrement et des domaines, Administration des
Douanes et Accices).
- Pour certains crédits budgétaires il y a une compétence conjointe de plusieurs
ministres. Les articles budgétaires concernés sont précisés par règlement grand-ducal.
Exemples:
- Les crédits pour l'indemnisation des membres de jurys d'examen ou pour le paiement
d’heures supplémentaires sont ordonnancés conjointement par le ministre du ressort et
le Ministre de la Fonction publique.
- Attribution aux agents de la police d'une partie des amendes recouvrées: compétence
conjointe du Ministre des Finances et du Ministre de la Justice.
- Pour les crédits de rémunérations des agents de l'Etat, inscrits dans les budgets des
différents départements ministériels, un règlement grand-ducal donne compétence pour
l'engagement et l'ordonnancement au Ministre de la Fonction publique.
4) Les sections budgétaires
Le budget de chaque département est subdivisé à son tour en une ou plusieurs sections.
La nécessité de subdiviser le budget des dépenses en sections résulte de LC-18: « Aucun
transfert d'une section du budget à l'autre ne peut être effectué qu'en vertu d'une loi ».
Il s'ensuit que chaque service public (armée, police,...) doit disposer dans le budget des
dépenses d'une section distincte et aucune section du budget des dépenses ne peut
comprendre les dépenses de plus d'un service public. La Constitution veut en effet
empêcher que, par le biais de transferts, les membres du Gouvernement ne
détournement de leur destination des crédits votés par la Chambre.
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5) Les articles budgétaires
Les sections sont subdivisées à leur tour en articles.
La LC- 3(4) précise que « L'article budgétaire ne peut en principe couvrir que des
recettes ou des dépenses de même nature économique »
A partir du budget de 1991 a été introduit un plan comptable uniforme.
A titre d'exemple, ce plan oblige les départements de ventiler leurs frais de personnel
entre une douzaine d'articles budgétaires différents; de même une trentaine d'articles
standard sont prévus pour les dépenses de fonctionnement courantes des administrations
et services.
Il est évident que tous les types de dépenses prévues par le plan comptable ne se
rencontreront guère dans un service déterminé: seuls les articles pour lesquels des
dépenses sont effectivement prévues seront renseignés dans les sections budgétaires.
6) Le détail des articles budgétaires
En vue de fournir une information plus exhaustive aux organes appelés à donner un avis
sur le projet de budget (chambres professionnelles et Conseil d'Etat) ainsi qu'à la
Chambre des députés, les articles budgétaires sont à leur tour détaillés au projet de
budget. Pour certains articles le plan comptable prévoit le libellé et la numérotation des
détails à fournir.
Les détails n'ont cependant qu'une valeur indicative et tiennent lieu, en quelque sorte,
d'exposé de motifs pour les différents articles du budget.
Ils ne font pas partie du budget voté et publié et ne lient donc pas les membres du
Gouvernement sur le plan juridique lors de l'exécution de leurs budgets.
Structure de l'article budgétaire (exemple d'article budgétaire)
La structure générale du numéro d'un article budgétaire est la suivante:
XX . Y . ZZ . TTT
Département Section 2 premiers 2 premiers chiffres:
chiffres du code sous-classif. comptable
comptable dernier chiffre:
(= code écon. no d'ordre
en principe) (en principe)
+ code économique + code fonctionnel
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Dans l’exemple sous revue:
07 . 2 . 12 . 040
Justice Etablissements Frais de fonct. courant frais de
pénitentiers bureau
Remarque: La présentation de l’article budgétaire telle que décrite ci-dessus ne s'applique pas au budget
pour ordre qui connaît une simple numérotation des opérations y imputées.
B) Les classifications du budget
Par classification il y a lieu d’entendre le regroupement des dépenses et/ou des recettes
inscrites au budget (ou au compte de l’Etat) suivant certains critères.
Les classifications budgétaires traditionnellement effectuées au Luxembourg sont au
nombre de quatre, à savoir:
1 - La classification administrative des recettes et dépenses
2 - La classification économique des recettes et dépenses
3 - La classification fonctionnelle des recettes et dépenses
4- La classification comptable des recettes et dépenses
1) La classification administrative des recettes et des dépenses
La classification des recettes et des dépenses par départements ou sections est appelée
classification administrative du budget: le critère de classement principal d'une recette
ou d'une dépense réside dans le ministère et le service appelé à traiter l'opération; c'est
un critère administratif.
La classification administrative est basée sur la structure des articles budgétaires telle
que précisée ci-dessus. (les 2 premier chiffres de l'article indiquant le département
dépensier, le 3ème chiffre le service (section) concerné)
2) La classification économique des recettes et dépenses
La classification économique qui, comme son nom l'indique, permet de classer les
recettes et les dépenses de l'Etat d'après leur nature économique et suivant un plan axé
sur la comptabilité nationale, a pour objet de dégager la nature économique de l'activité
de l'Etat et de mettre ainsi en évidence l'influence des transactions de l'Etat sur
l'économie nationale. Elle se base sur le code économique attaché à chaque article
budgétaire.
3) La classification fonctionnelle des recettes et dépenses
La classification fonctionnelle regroupe les recettes et les dépenses suivant leur
destination, c'est à dire suivant le type de mission remplie par l'Etat. Elle a pour but de
regrouper dans des tableaux synoptiques toutes les dépenses de l'Etat en une synthèse
des missions essentielles assumées par lui. Elle se base sur le code fonctionnel attaché à
chaque article budgétaire.
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La classification fonctionnelle aboutit parfois à des regroupements voisins de ceux
opérés par la classification administrative; des différences existent cependant: d'une part
une même mission peut ressortir de la compétence de plusieurs ministères (ainsi le code
04.5x - "autres formes d'enseignement " se retrouve tant dans la section 12.0 du
Ministère de l'Education nationale qu'à celle 16.3 - Ecole supérieure du travail
dépendant du Ministère du travail); d'autre part un seul et même département peut
poursuivre des missions très variées.
La différence entre la classification fonctionnelle et économique est par contre très
nette: ainsi l'engagement d'un gardien au musée et la construction d'un nouveau musée
correspondent à la même fonction 08.1 - "Arts et archéologie", mais ont des codes
économiques différents, en l'occurrence "frais de personnel " et "investissements". A
l'inverse les crédits destinés à la construction d'un musée ont le même code économique
que ceux servant à la construction d'un nouveau palais de justice, mais correspondent à
des missions différentes.
4) La classification comptable des recettes et dépenses
La classification comptable permet de regrouper les recettes et dépenses suivant leur
destination économique finale. Elle correspond dans la grande majorité des cas à la
classification économique, les classes comptables étant confondues par ailleurs avec les
classes économiques ci-dessus. Elle se base sur les codes issus du plan comptable et
formant la dernière partie de la numérotation d’un article budgétaire.
Les regroupements comptables des dépenses et des recettes sont indiqués au projet de
budget à la fin du budget de chaque département ainsi que de façon globale pour
l'ensemble du budget de l’Etat.
C) Le principe de « l’adaptation » des chiffres budgétaires dans le cadre de la
classification économique et de la classification fonctionnelle.
Les classifications économique et fonctionnelle vont plus loin que l’approche
administrative ou comptable à la base des classifications du même nom. Il s’agit en effet
d’apprécier la « réalité » économique ou fonctionnelle de l’intervention étatique.
Pour ce faire certains chiffres inscrits au budget/compte de l’Etat doivent être adaptés
afin de tenir compte de différentes techniques budgétaires ou comptables en raison
desquelles ces chiffres ne correspondent pas à une « réalité » d’un point de vue
économique ou fonctionnel.
- Si la classification comptable est basée sur les crédits inscrits au budget (c.-à-d. sans prendre en
considération les dépenses et les recettes des Fonds spéciaux), la classification économique prend en
compte les dépenses et les recettes effectives des Fonds spéciaux. En d’autres mots l'alimentation
budgétaire des Fonds spéciaux est remplacée pour l'établissement de la classification économique par les
mouvements financiers qui se sont effectivement réalisés par le biais des fonds spéciaux
- Dans la classification économique, un certain nombre d'établissements publics tout en possédant un
statut juridique distinct de l'Etat, doivent être intégrés dans le secteur des administrations publiques
(exemples: Fonds d'urbanisation et d'aménagement du plateau de Kirchberg, fonds de remembrement des
biens ruraux, fonds national de soutien à la production audiovisuelle etc.) Le traitement économique de
ces établissements s'effectue de manière similaire au traitement des fonds spéciaux. Deux situations
peuvent se présenter:
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Si l'établissement en question bénéficie d'une dotation de l'Etat, cette dotation doit être neutralisée et elle
est remplacée par les dépenses voire les recettes effectives de l'établissement en question. Si par contre
aucune dotation de l'Etat n'est accordée à l'établissement, seules les recettes et dépenses effectives sont
intégrées dans la classification économique.
- La classification comptable classe les opérations suivant la destination économique finale (Exemple:
participation de l'Etat dans le traitement des agents de la sécurité sociale = code 11 rémunérations). La
classification économique classe suivant la destination économique effective (Participation de l'Etat dans
le traitement des agents de la sécurité sociale = code 42 Transfert à la sécurité sociale).
Illustration de la classification comptable des dépenses courantes et en capital (projet
de budget 2008)
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CHAPITRE 3- ELABORATION ET MODIFICATION DU BUDGET
A) L'élaboration du budget
1) Travaux au niveau du pouvoir exécutif
Etant donné l'importance tant formelle que matérielle du budget, sa préparation suit un
calendrier très rigoureux. Ce calendrier est le suivant:
Début avril N-1: Distribution de la circulaire budgétaire
La circulaire budgétaire émise par le Ministre en charge du budget contient des lignes
directrices de nature politique (par exemple stratégie budgétaire et objectifs) et de
nature technique (par exemple hypothèses macroéconomiques, plafonds de taux de
croissance par catégorie de dépenses publiques, prix maxima à mettre en compte pour
certaines catégories de dépenses). Ces lignes directrices sont à observer par les
départements ministériels lors de l'établissement de leurs propositions budgétaires.
En particulier la circulaire budgétaire contient des précisions quant à l'évolution
prévisible de l'inflation et la valeur consécutive à mettre en compte en ce qui concerne
la cote moyenne d’application de l'échelle mobile des salaires.
Avril à mai N-1 : Mise au point des propositions budgétaires dans les départements
ministériels et envoi de celles-ci au Ministère des Finances - Ministre du Budget, et à
l'Inspection générale des finances avant mi-mai.
A l'intérieur des départements ministériels, les différents membres du Gouvernement
sont invités à procéder à une révision des demandes de crédits formulées par les
différents services ou administrations relevant de leur compétence en vue d'élaborer des
propositions budgétaires cohérentes en concordance avec les objectifs de politique
budgétaire annoncés dans la circulaire budgétaire
Mai / juin N - 1 : Examen des propositions budgétaires par l'Inspection générale des
finances et mise au point des propositions définitives au cours des réunions
interdépartementales (examen contradictoire des propositions budgétaires).
Dans une première phase et conformément à l'article 2 de la loi du 10 mars 1969
l'Inspection procède à l'examen des propositions budgétaires.
D'après l'article 7 de la même loi, l'Inspection doit recevoir communication de tous les
documents et dossiers qu'elle demande à ces fins; elle peut en outre s'entourer de tous
les renseignements qu'elle juge utiles à l'accomplissement de sa mission.
Les fonctionnaires chargés de l'élaboration des propositions budgétaires des
départements ministériels doivent donc tenir ou mettre, si nécessaire, à la disposition du
Ministère des Finances et de l'Inspection générale des finances tous les documents,
calculs, etc. permettant de vérifier l'exactitude et le bien-fondé des crédits proposés.
Au cours d'une seconde phase, les représentants de l'Inspection générale des finances
procèdent, avec les fonctionnaires des départements ministériels, à un examen
contradictoire des propositions budgétaires initiales.
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Lors de ces réunions interdépartementales, les représentants des deux départements
respectifs ont pour mission de mettre en oeuvre, dans toute la mesure du possible, les
directives de politique budgétaire énoncées par le Ministre du Budget dans la circulaire
budgétaire.
Pour que la plupart des problèmes, notamment tous les problèmes courants, puissent
être vidés au cours de ces examens contradictoires et que le nombre des questions à
débattre sur le plan gouvernemental soit réduit à un strict minimum, à savoir aux
affaires importantes à caractère politique, les fonctionnaires mandatés des départements
ministériels doivent être désignés parmi les cadres dirigeants et être munis des pouvoirs
nécessaires.
En vue d'assurer un déroulement satisfaisant des examens contradictoires, chaque
département ministériel ne pourra être représenté en principe que par un seul délégué.
Au besoin, celui-ci pourra cependant se faire assister par l'un ou l'autre expert.
Juin /juillet N-1 : Préparation des travaux du Conseil de Gouvernement.
En vue de la préparation des réunions du Conseil de Gouvernement, l'Inspection
générale des finances établit les procès-verbaux des réunions interdépartementales qui
indiquent, d'une part, les modifications admises lors des examens contradictoires par
rapport aux propositions initiales et, d'autre part, les modifications supplémentaires
proposées éventuellement par l'Inspection ainsi que les questions d'ordre politique qui
restent à être tranchées (document: "Questions à trancher par le Conseil de
Gouvernement).
Septembre N-1: Mise au point définitive du projet de budget par le Conseil de
Gouvernement.
Les questions importantes d'ordre politique au sujet desquelles un accord n'a pu être
trouvé lors des réunions interdépartementales (examens contradictoires) sont tranchées
au niveau gouvernemental, suivant les cas, soit au cours de réunions interministérielles
("examens bilatéraux"), soit au niveau du Conseil de Gouvernement.
Mi- octobre N -1: Dépôt du projet de budget à la Chambre des Députés.
En vertu de LC- 6 " Le projet de budget de l'année est accompagné d'un rapport sur la
situation financière et budgétaire et ses perspectives d'évolution dans le cadre
économique général ainsi que d'annexes explicatives faisant connaître notamment:
- la situation financière des services de l'Etat à gestion séparée;
- l'encours des garanties accordées par l'Etat;
- la situation financière des fonds spéciaux, indiquant pour chaque fonds spécial son
évolution pluriannuelle passée et prospective."
Remarque: Procédures budgétaires particulières
- Propositions tendant à l'engagement de nouveaux agents de l'Etat : Procédure du
numerus clausus
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Les propositions sont à adresser au Premier Ministre, Ministre d'Etat qui les soumet (en
principe) pour avis à la Commission d'économies et de rationalisation (CER). Cette
commission établit un avis quant au nombre et la répartition des nouveaux engagements
à opérer au cours de l'exercice à venir. Sur base de l'avis de la CER, le Conseil de
Gouvernement arrête le nombre des nouveaux engagements ainsi que leur répartition.
A noter qu'outre cette compétence lors de l'établissement du projet de budget, la CER est appelé à donner
son avis, en cours d’exercice, sur tout remplacement à opérer sur un poste vacant, sur l'engagement
d'agents temporaires en cours d'exercice, ainsi que sur les renforcements des services par des agents
engagés à temps partiel.
- Propositions tendant à faire introduire ou refixer des indemnités ou primes: décision
du Conseil de Gouvernement sur avis de la "Commission chargée de l'examen des
cumuls".
- Budget des dépenses en capital: en principe les crédits doivent s'insérer dans les
limites tracées par le programme pluriannuel d'investissements actualisé annuellement.
Remarque: Bien que le Ministre du Budget joue un rôle prépondérant dans la
préparation du projet de budget, ce projet est examiné en dernier lieu, comme d'ailleurs
tout projet de loi, par le Conseil de Gouvernement, qui est obligé de délibérer sur toutes
les affaires qui doivent être soumises à la décision du Grand-Duc (arrêté grand-ducal de
dépôt du projet de loi).
2) Travaux au niveau du pouvoir législatif
Le budget de l'Etat étant une loi au sens formel, il est arrêté par les organes du pouvoir
législatif suivant la procédure normale applicable aux projets de loi d'initiative
gouvernementale, mais la procédure est accélérée pour des motifs d'urgence.
Ainsi le projet de budget est déposé à la Chambre des Députés sans que le Conseil
d'Etat ait été préalablement entendu en son avis. De même, l'examen du projet de budget
par la Commission des Finances et du Budget de la Chambre se fait parallèlement à
l'instruction préparatoire du projet par le Conseil d'Etat. En général, l'avis du Conseil
d'Etat est cependant rendu avant que la Chambre ne passe à la discussion publique du
projet de budget.
En vertu du règlement de la Chambre des Députés « le Ministre ayant dans ses
attributions le budget de l'Etat saisit la Chambre des Députés, le Conseil d'Etat et les
chambres professionnelles du projet de loi concernant le budget des recettes et des
dépenses de l'Etat pour l'année subséquente au cours de la 3e semaine d'octobre au
plus tard.»
Remarque: Le recours aux douzièmes provisoires:
Si, pour des raisons diverses, le budget ne peut pas être voté, sanctionné, promulgué et
publié avant le commencement de l'exercice auquel il se rapporte, il importe d'avoir
recours au vote de "douzièmes provisoires" . Il s'agit d'une loi spéciale qui a pour objet:
- d'autoriser le Gouvernement à percevoir les impôts existant au 31 décembre de l'année
précédant le commencement du nouvel exercice. (cf. C-100 annualité des impôts).
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- de rendre applicables pour un ou plusieurs mois d'autres dispositions essentielles de la
loi budgétaire.
- d'autoriser le Gouvernement à effectuer, pendant la même période, les dépenses
prévues au projet de budget jusqu'à concurrence d'un montant global proportionnel à
cette période. Dans une approche plus rigoureuse, les dépenses à effectuer sont limitées
au montant, proportionnel à la période concernée, des recettes escomptées.
Les "douzièmes provisoires" constituent des pré budgets partiels pour un ou plusieurs
mois, votés par la Chambre des députés, qui sont ensuite repris dans le budget
proprement dit.
La procédure des "douzièmes provisoires" contrevient au principe de l'annualité
budgétaire. Aussi est-elle contraire au principe de l'unité budgétaire, puisque si
plusieurs douzièmes doivent être votés successivement, on aboutit à un morcellement
du budget.
La procédure des "douzièmes provisoires" - technique non prévue par la législation sur
la comptabilité de l'Etat- a été appliquée pour la dernière fois au cours des années 60.
( cf Loi du 23 décembre 1963 ayant pour objet :
1. d’ouvrir au Gouvernement un crédit provisoire de 2.235.865.000 francs pour les mois de
janvier, février, mars et avril 1964 ;
2. d’autoriser le Gouvernement à recouvrer les impôts directs et indirects existant au 31 décembre
1963 d’après les lois et les tarif s qui en règlent l’assiette e et la perception et
3. de rendre applicables certaines dispositions figurant au projet de loi concernant le budget des
recettes et des dépenses de l’Etat pour l’exercice 1964)
B) Les modifications du budget
Comme le budget est un acte de prévision qui est élaboré longtemps en avance, il doit
pouvoir être adapté en cours d'exécution aux aléas de la vie économique et sociale. Ces
adaptations, qui ne devraient pouvoir porter que sur des cas vraiment imprévisibles ( et
non pas imprévus) sont d'ordre législatif ou d'ordre exécutif.
1) Les modifications législatives du budget voté
A cet égard il y lieu de distinguer deux sortes de modifications: les budgets rectifiés et
les crédits spéciaux.
a) - Les budgets rectifiés:
Les budgets rectifiés sont des lois dont l'élaboration est soumise à la même procédure
que les lois ordinaires et qui ont pour but d'apporter des retouches aux recettes et au
dépenses prévues par les budgets votés, afin de les ajuster en cours d'exercice aux
changements intervenus dans les conditions économiques et sociales.
Bien que n'étant pas prévus par notre législation, de tels budgets ont été établis à la fin
des années soixante, mais sont tombés en désuétude depuis cette date.
b ) - Les crédits spéciaux:
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En dehors des budgets rectifiés proprement dits, des lois à répercussions financières
peuvent modifier le budget voté sur des points précis, soit en y ajoutant de nouveaux
crédits, soit en augmentant des crédits déjà prévus.
Exemple : Le budget voté de l’exercice 2005 a été modifié par la loi du 25 juillet 2005 portant création
d’un lycée-pilote. L’article 17 de cette loi a ajouté au budget de l’exercice 2005 un article nouveau avec
les libellé et crédit suivants : "Lycée-pilote : frais d’exploitation courants . . . . . . . . . . 50.000 euros"
NB: Tant les budgets rectifiés que les budgets spéciaux représentent des entorses au
principe de l'unité budgétaire, alors qu'ils conduisent au vote du budget par tranches.
Aussi LC-48 prescrit-elle que " Toute demande de crédit faite en dehors du Budget
annuel doit indiquer les voies et moyens de couvrir la dépense". Or, la disposition
analogue existant sous la législation de 1936 -pourtant formelle- est restée souvent
inobservée!
NB: Budget voté + [budget rectifié + ] crédits spéciaux = "Budget définitif" .
2) Les modifications exécutives du budget voté
Deux procédés permettent à l'exécutif de modifier les crédits votés par la Chambre des
Députés:
- les transferts d'excédents de crédits
- les dépassements de crédits non-limitatifs
Vu que ces procédés constituent une entorse aux pouvoirs d'autorisation du Parlement,
ils sont entourés d'un certain nombre de restrictions visant à éviter des abus.
a) - Transferts de crédits
Base légale : LC-18: "(1) Aucun transfert de crédit d'une section du budget à
l'autre ne peut être effectué qu'en vertu d'une loi.
(2) Aucun transfert de crédit d'un article à l'autre dans la même section ne peut
être opéré avant le premier novembre d'un exercice. Dans des cas exceptionnels,
de tels transferts peuvent être autorisés par le ministre ayant le budget dans ses
attributions avant cette date."
En pratique les demandes de transfert avant le 1er décembre sont soumises à l'avis de
l'IGF.
Le transfert à l’intérieur d’une même section budgétaire (la section correspondant en
principe à une administration) est réalisé par arrêté du ministre ordonnateur. Copie des
arrêtés de transfert est envoyée par le ministre ordonnateur pour information à la
Chambre des Députés, au Ministre du Budget et au contrôleur financier.
L'effet du transfert :
L'effet du transfert est de diminuer le crédit de l'article d'origine à concurrence du
transfert ainsi que de majorer du même montant le crédit de l'article de destination.
(d'où: il n'est pas possible d'introduire par transfert des crédits pour des dépenses de
nature non prévue au budget de l’administration concernée). Le transfert n'influe ni sur
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le total des dépenses du budget voté, ni à fortiori sur l'équilibre entre recettes et
dépenses.
A ajouter qu’un article peut être augmenté ou diminué plusieurs fois par voie de
transfert au cours d'un même exercice budgétaire.
Limites aux transferts de crédits: Crédits non-susceptibles de transfert (cf. infra: Les
différentes catégories de crédits budgétaires)
b) - Dépassement de crédits non-limitatifs
Base légale LC-66: "En cas d'insuffisance de crédits à l'endroit d'un article
libellé "Crédit non limitatif", pour des dépenses imprévisibles, indispensables et
dont le règlement ne peut être différé, le ministre ayant le budget dans ses
attributions peut autoriser préalablement à l'engagement un dépassement de
crédit sur demande motivée du ministre ordonnateur"
La loi sur la comptabilité prévoit donc le dépassement de crédits budgétaires, à
condition toutefois que le ministre ordonnateur ait obtenu l'autorisation du Ministre du
Budget avant même l'engagement de la dépense Encore y a-t-il lieu de souligner que
sont susceptibles d'être dépassés que les seuls crédits qui portent la mention "crédit nonlimitatif")
(cf. infra Chapitre 4). Alors que la possibilité de transfert est la règle, celle
de pouvoir dépasser un crédit constitue donc l'exception !
Les dépassements modifient le total du budget et l'équilibre budgétaire. Un même
article de dépenses peut faire l'objet de plusieurs dépassements au cours d'un même
exercice.
Remarques:
* cf. Loi IGF - 2. " A la demande du Ministre du budget, [L'IGF] donne son avis sur le
dépassement des crédits non-limitatifs".
* constituent des dépassements de nature particulière l'affectation d'éventuelles plusvalues
de recettes aux fonds spéciaux (affectation décidée depuis l’exercice 1999 par le
biais d’une loi spéciale sur l’affectation de l’excédent de recettes budgétaires de d’un
exercice donné)

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